L'effacement

Né à Madagascar en 1958, je commence à écrire vers l'âge de douze ans, des poèmes, des histoires courtes... Actuellement encore je continue avec des nouvelles et des textes plus aboutis, dont je vous présente l'un d'eux aujourd'hui.

C'est l'histoire d'un homme qui pour vouloir rendre justice traque un fantôme qui a fait beaucoup de mal et de victimes. Il cache un lourd secret et veut donc rétablir la vérité, surtout pour l'amour de sa femme. La deuxième partie du récit donne la parole à des femmes qui ont leur mot à dire, car à un moment donné elles ont rencontré bien malgré elles, la route de ce monstre, grâce à la ténacité de celui qui a voulu tout effacer.

Extrait  

Un couple, James et Delphine. Lui est irrémédiablement stérile et elle se désespère mais tous deux acceptent leur sort. Ils ont toujours hésité à l’adoption, lui subit toutes sortes d’examens, en vain. Ils n’auront donc jamais d’enfant.

Elle est fidèle et ne jure que par lui, elle est amoureuse et très attachée à son mari.

"On n'aura pas d'enfants, on ne sera jamais des parents, qu'importe, on sera toujours, d'éternels adolescents" dit-elle en rigolant. Mais un jour un événement incroyable arrive. Et sans hésiter ; il veut tout effacer.

Cet homme est confronté à quelque chose qui lui échappe, et il doit faire face à un monde qu'il ignore. Il n'a pas le profil d'un héros, mais il domine ses peurs, et avec son courage il décide d'affronter une dure réalité. 

"Je tourne une page de mon passé, mais le livre reste ouvert"

Ce matin de Janvier un soleil timide se cache derrière les arbres et dans le jardin, un homme s’affaire à creuser, le visage fermé, les lèvres serrées, il essuie son front, ses larmes. La gorge sèche il respire profondément et continue son travail harassant. Il ne sent plus le froid, il s'acharne sur le sol dur de l’hiver, comme un forcené. La pelle soulève péniblement la terre glacée, ses mains engourdies tremblent mais il continue sans relâche dans le vent glacial sans faillir. Puis, peu de temps après, il tape énergiquement du pied le sol durci par le froid pour tasser la terre, arrange un peu le gazon maigre et rare autour d’un petit monticule, il s’en va et range sa pelle dans l’abri. Il se retourne jette un regard rapide en arrière et se dirige vers la maison. Dans le couloir il évite de faire du bruit et se dirige vers la chambre. Elle dort encore, enveloppée dans les draps et reste un long moment à la contempler. Sa respiration lente soulève à chaque respiration une petite mèche de cheveux. Elle a l'air fatiguée, puis après quelque secondes, il ferme la porte et s'en va sans faire de bruit.

Pris entre la haine, la pitié et l’incompréhension, une colère sourde prend le dessus, mais il fait un effort pour ne pas tout casser autour de lui.

Il se déshabille, et se passe les mains un long moment sous le robinet. Puis il prend une douche en se frottant énergiquement à s'arracher la peau. Il n'en peut plus, il se sent mal. Il range ses chaussures pleines de boue dans un placard, avec ses vêtements, il les lavera plus tard; il ne veut pas faire de bruit. Assis dans la cuisine devant un café il se pose milles questions. Malgré l'heure Il se sert un whisky .Pour le moment il n'a plus vraiment la notion du temps il boit le tout d’une traite, fait la grimace. Il lui faut quelque chose de fort, il lui faut un choc. Mais bien vite il se rend compte que cela ne sert à rien. Il est encore plus mal.

Il se sent blessé, et sent une trahison. Il est bafoué, pire encore ; trompé. Mais pourtant il n'y croit pas. Ce n'est pas possible, Il reste un instant, allongé sur le canapé, et s’effondre. Il se réveille enfin, quelques minutes plus tard puis regardant l’heure, il doit se rendre à son agence. Bientôt huit heures, qu'importe.

Dans l’entrée il entend Delphine qui l’appelle. James lui répond qu’il est terriblement en retard et qu’il doit s’en aller. Il veut s’en aller au plus vite et ne veut pas la voir, ni lui parler, et encore moins croiser son regard. Il est perdu et ne veut rien entendre. C'est bien la toute première fois qu'il quitte la maison sans lui donner un baiser, sans même lui dire 'au revoir'.