LES NUES MENDIANTES

ÉTIENNE DE SAINT-EXIL, écrivain, peintre, communicateur et conférencier, est né à Cap-Haïtien et réside depuis peu en Bretagne . C’est un créateur avec la fougue de dire et d’inventer tout ce que sa fantaisie lui inflige, et porte dans ses veines l’audace de transformer chaque lettre en un monde émerveillé ou improbable, et une simple histoire en une pièce d’art qui te dit halte là, te poussant à la curiosité du titre jusqu’à l’ultime ponctuation. 

Son Haïti natale est une grande source d’inspiration au quotidien, c’est de là qu’il se ressource pour offrir des œuvres valables, capables de réveiller la conscience collective humaine. Ainsi, les déchirures sociales et le chaos qui sévit dans la région métropolitaine de Port-au-Prince lui insufflent ce beau roman qui raconte un pan de la mosaïque d’une réalité si immense et controversée. LES NUES MENDIANTES, cette œuvre dont le manuscrit a été finaliste au Prix International René Depestre en 2023, à Paris, est un roman qui raconte, mine de rien, au delà d’une réalité locale, une autre réalité transversale touchant diverses sociétés : ce sont les prétentions sociales, des fractures qu’on n’ose pas dire tout haut. Voilà pourquoi il faut avoir intérêt à sa création, et à son succès.

Extrait du livre : 

Une bousculade soudaine me surprend sur la hanche ; une autre dans le dos, beaucoup plus accentuée que la précédente. Je me retourne pour un jet de « purulentes invectives », quand, à l’impromptu, une petite dame singulière d’un certain âge me coupe par son affabilité : 
– Je m’en excuse, beau monsieur, je prie votre indulgence, fait-elle tout empressée, l’air peu attentif à ce que je réponde. 
    Je n’ai pu lâcher mot, je suis éberlué qu’une si élégante phrase soit prononcée par une dame dont l’appartenance sociale ne peut être que la même que celle du précédent bourru immonde qui m’a piétiné. Mes lèvres restent ouvertes, hagardes : les mots accrochés au plafond palatal, comme de vieilles chaussettes délaissées sur une haie vive faite de cactus et d’autres herbes sauvages. Je reste évasif, les yeux écarquillés, comme si j’avais une araignée au plafond. 
— Incroyable, balbutié-je, encore tout hébété. La regardant partir, sans histoire.  
    C’est impossible. D’habitude, ces sottes gens sont si étrangers aux civilités les plus élémentaires. Ils te marchent dessus et t’enculent en plus. Et moi qui riposterais avec hargne et démangeaison des nerfs.