Une vie de flic -RÉVÉLATIONS-

Retraité de la police nationale au grade de Commandant honoraire depuis 2018, j'effectue depuis lors, en qualité de réserviste, de nombreuses missions opérationnelles à l'étranger, principalement en Afrique subsaharienne.

Mon livre décrit une centaine d'anecdotes parisiennes, relatées le plus fidèlement possible, qui ont jalonné ma carrière policière. Même si j'ai oublié plusieurs milliers d'autres aventures, celles qui sont rapportées sont restées gravées dans ma mémoire, car elles sont toutes originales, singulières, parfois même incroyables, à telle enseigne que j'estime inespéré d'avoir pu les vivre au fil de mes 37 ans de carrière.

Si certaines d'entre elles décrivent des personnalités connues (politique et showbiz) dans leurs travers les plus inavouables, d'autres dépeignent des interventions policières mettant en scène de simples quidams dans des situations particulièrement atypiques, si ce n'est stupéfiantes par l'enchaînement même des événements.

Il semble que jamais un livre comme celui-ci n'ait été jusqu'alors rédigé, car il est sans filtre et le plus fidèle possible à la réalité, ayant pu m'appuyer sur des procédures judiciaires gardées par-devers moi. Par ailleurs, ayant comme fil conducteur l'authenticité, mes aventures couvrent quatre services parisiens de cette institution, ayant régulièrement bénéficié de mutations, dans un esprit de curiosité et pour rester attentif à des milieux totalement différents les uns des autres.

Enfin, elles sont très souvent décrites sur un ton humoristique, ayant d’ailleurs opté pour ce choix tout au long de ma carrière, afin de me détacher de la charge émotionnelle que revêtent tant d'affaires policières.

Extrait 

Une fille indigne 

Alors que j’assurais la permanence d’accueil, j’ai hérité ce jour-là d’une belle surprise, qui méritait d’être considérée à sa juste valeur. Ce n’était pas souvent qu’une affaire criminelle nous était exposée à l’accueil de ce simple commissariat perdu au fin fond d’un arrondissement oublié de tous.

En conséquence, si on ne traitait pas cette affaire le plus discrètement possible, on risquait d’en être dessaisis au profit d’un service réputé comme plus spécialisé en la matière. Et dans le cas présent, comme elle nous séduisait et semblait à notre portée, il n’en était pas question !

Un industriel, nommé Marc Vogler, venait donc au commissariat pour nous raconter que sa fille Anaïs, âgée de vingt ans, n’avait pas donné de ses nouvelles depuis deux jours.

Si, en tant que majeure, elle en avait parfaitement le droit, il nous spécifiait que, lui-même étant veuf, elle demeurait à son domicile et ne découchait jamais sans prendre la précaution de le prévenir. Comme il était pétri d’affliction, nous ne pouvions l’écouter qu’avec sérieux et dans l’espoir de lui venir en aide, autant que les moyens dont nous disposions le permettaient.

Surtout qu’il nous indiquait un élément fort inquiétant, mais qui attisait vivement notre curiosité :

La veille de son déplacement chez nous, il avait reçu un appel téléphonique d’un homme dont il ne reconnaissait pas l’intonation de la voix. Cet interlocuteur anonyme lui avait signalé, sur un ton lent et monocorde, avoir enlevé sa fille bien-aimée. Pour la lui restituer saine et sauve, il lui réclamait 100 000 francs en liquide (soit plus de 15 000 euros) avec, bien évidemment, l’interdiction d’en souffler mot aux forces de l’ordre.

Le père, assez riche mais franchement inquiet, avait envisagé dans un premier temps de se plier aux exigences du ravisseur. Cependant, craignant que la remise de la rançon ne déclenche pas forcément la libération de sa progéniture il avait opté, après une nuit de réflexion, pour porter ces éléments à la connaissance de la police. Par ailleurs, il redoutait de devoir, de nouveau, acquitter à l’avenir une seconde rançon à cet effet, devenant in fine l’objet d’un racket qui n’aurait pas trouvé de fin.

En cela, il contrevenait aux instructions très fermes du ravisseur qui l’avait averti que, s’il courait le moindre risque d’être interpellé, le papa aimant ne reverrait jamais sa fille vivante.

Dans l’optique de la remise de rançon, un rendez-vous avait donc été pris pour seize heures ce même jour, à la terrasse d’un café situé sur la place de la République.