À fleur de mots - Tome 1 Vie heureuse à Oran

Joseph-Jean Cervellon est né à Oran, dans ce quartier populaire de la Calère, un « petit hameau rayonnant de vie, face à la mer », comme il aime le nommer. Issu d’une famille ouvrière, il a grandi au rythme de la Méditerranée, dans une Algérie encore française, marquée par les espoirs, les douleurs et les départs.

Formé dans un lycée technique naval, il quitte précipitamment sa ville natale avec sa famille après les tragiques événements du 5 juillet 1962. Ce déracinement brutal façonnera durablement son regard sur le monde. Après un passage dans la Marine nationale, où il est affecté à la base aéronavale d’Ajaccio, il entame un parcours professionnel européen : cinq années à Amsterdam comme assistant technique, puis cinq autres à Bruxelles en tant que représentant légal et directeur des ventes.

De retour en France en 1977, il s’installe à Perpignan et se spécialise dans le commerce international. Durant plus de deux décennies, il développe l’activité export d’une grande entreprise agroalimentaire espagnole.

Mais c’est dans l’écriture que Joseph-Jean Cervellon puise depuis toujours sa respiration profonde. Dès les années 60, il consigne pensées et souvenirs dans un journal intime. Ce besoin de transmettre, de dire, de témoigner, a mûri lentement, jusqu’à donner naissance à À fleur de… mots, un récit au long cours en quatre tomes, porté par une langue sensible et enracinée.

Dans ce premier roman en 4 tomes, il livre une œuvre chargée d’humanité, d’exils et de fidélité aux siens. À travers des personnages en clair-obscur, profondément inspirés de son histoire, il dévoile, avec pudeur mais sans détour, les contours d’une mémoire intime et collective.

À fleur de… mots est bien plus qu’un roman : c’est un cri du cœur, un chant de mémoire, une invitation à ne pas oublier.

À fleur de mots est un récit épistolaire né d’une correspondance authentique entre Yasmina et Victor, deux jeunes amoureux d’Algérie, marqués à jamais par l’Histoire. À travers leurs lettres se mêlent souvenirs intimes, événements réels et fragments de fiction. Le livre traverse les années 1950-60, de la guerre d’Algérie à l’indépendance, tout en convoquant l’amour, la perte, les blessures coloniales et la force des mots. Les personnages — Maria, Jef, Jean, Yasmina, Victor — sont inspirés de vécus profonds et sincères. Le ton est parfois romanesque, souvent bouleversant, toujours engagé. Camus, Sartre, Jeanson ou encore Kamel Daoud s’invitent dans cette fresque où la littérature devient refuge et arme douce. C’est une œuvre sensible, littéraire et politique, à la mémoire vive. Un livre pour les lecteurs attachés à la vérité des sentiments et aux complexités de l’Histoire.

Extrait du livre

Oran, avril 1962

Ma chère Mina,

Je t’écris une fois encore depuis notre Calère bien-aimée, cette ruelle qui descend vers la mer et que j’arpente chaque matin avec un mélange d’espoir et de vertige. Ici, tout semble en suspens. Les jours passent et se ressemblent, avec leurs silences lourds, leurs portes entrouvertes sur des adieux à peine murmurés.

L’indépendance approche, je le sais, mais je ne la ressens pas comme une victoire. Elle s’écrit dans le sang des rues, dans les cris étouffés derrière les volets. Mon frère et moi, nous évitons certains quartiers. Tu sais lesquels. Là où l’on ne sort plus vivant si l’on n’est pas du bon côté.

Pourtant, je t’imagine encore là, à côté de moi, sous les figuiers de l’impasse. Tu parlais d’Albert Camus comme on parle d’un frère disparu. Tu disais qu’il écrivait la lumière comme personne.

Moi, j’écris pour te retenir. Pour que ton rire, ton regard, ne deviennent pas des fantômes de papier.

Ta lettre d’hier m’a bouleversé. Oui, tu as raison. Ce que nous vivons, ce que nous ressentons, il faut l’écrire. Même maladroitement. Même si personne ne veut l’entendre.

Je t’embrasse.

Victor