Et que douce vous soit ma folie

Jeune retraité d'une vie consacrée à faire naître et s'épanouir des milliers de nos sœurs les plantes, les pieds sur Terre et la tête dans les nuages. Amoureux de musique, j'ai aussi été producteur et animateur de radio (jazz et classique).

« Et si le grand œuvre de toute existence humaine, n'était autre que celui du retour vers une innocence perdue, restée blottie au fond d'un ventre oublié, par delà la mémoire, le temps et l'espace. » Le livre s'ouvre, avec en exergue, cette phrase éminemment œdipienne, résumant à elle seule le sens ultime de tout ce qui va suivre. S'en suit une première partie d'une profonde sensibilité, évocatrice de l’Éden perdu de l'enfance, en exil de l'âme primordiale, celle du « petite frère » à jamais réduit au silence par le désenchantement de l'âge adulte ; véritable point d'orgue parcourant le livre de bout en bout. Puis, en deuxième partie, sous la forme d'un conte mêlant le fantastique au spirituel, oscillant entre rêve et réalité par la verve d'un imaginaire nourri, tantôt lyrique, tantôt cocasse, mais toujours sensible et tendre; nous assistons, par la voie du rêve, à une aventure initiatique confinant à la pure métaphysique, celle d'une quête cheminant de l'inconscience vers la conscience, de l'ignorance vers la connaissance, transcendant l'intime, pour in fine, embrasser l'universalité du retour vers l’Éternel Féminin. Mais ce livre est peut-être surtout et avant tout, une ode vibrante consacrée à la part féminine de l’Être. Un livre destiné à tous les amoureux d'absolu.

Extrait

Ce qui me frappa le plus, ceux sont tes yeux, ce regard scrutant tout alentour, incroyablement présent ; mais de cette présence propre aux hypersensibles, aux animaux farouches égarés en terre inconnue, voir hostile. Je te regardai t'asseoir, sagement, sans écart, obéissant comme une ombre. Voilà, c'est ça, une ombre, celle du recoin ignoré de tous. Une ombre aux yeux grands ouverts, scrutateurs, ne ratant rien ; ceux de l'étranger qui voit tout sans vouloir être vu, esquivant tous les autres regards, par crainte d'être dévoilé dans l'étrangeté de sa singularité.(...)

Et j'ai pleinement ressenti tout ton mal-être. J'ai vu et bu tes larmes intérieures. J'ai embrassé des causes inconnues de révoltes silencieuses et si douloureusement étouffées. J'ai entendu des plaintes plus déchirantes que le plus déchirant des Stabat Mater ; avec, en point d'orgue, cette impatience, dans l'attente que tout ceci veuille bien s'arrêter. Pendant le spectacle de marionnettes, de très mauvaise qualité, il faut bien le reconnaître, je ne pu que ressentir un moment de satisfaction en goûtant la saveur amère de ce qui ne pouvait que correspondre à ton sens critique précoce, celui d'un tout jeune esthète ; puis, cette si pesante solitude en ré mineur, teintée de fierté esseulée, dramatiquement esseulée, celle qui tient lieu de dignité aux éternels incompris. Mais aussi, dans toutes ces nuances de gris, quelques éclats de lumière, une douceur de ci de là, une pour chaque truffe en chocolat dégustée avec la plus grande attention...

Plus tard, tandis que les enfants applaudissaient encore en criant de joie après la tombée du rideau, spontanément, je m'écartai de toi, sans raison apparente, sans m'en sentir non plus obligé, comme une nuée passant dans le ciel. Le grand sourire de Bouddha reprit sa place, et nous attendîmes tous deux, que la jolie maîtresse, dont je pu à loisir savourer le charme, depuis la porte ouverte, prononce notre prénom en rajoutant : « Ta maman est là ».