RECIT D’INCESTE

Originaire de Neuilly-sur-Seine, diplômée en finance immobilière et en langue et civilisation anglaises, c’est pourtant la littérature qui m’a fait vibrer depuis mon plus jeune âge. Mère de deux petits garçons et écrivaine à mes heures perdues, je livre mes réflexions sur la violence intrafamiliale et sur la société dans laquelle nous évoluons tous.

L’écriture est salvatrice pour des gens qui, comme moi, n’ont eu d’autres choix que d’attendre pour pouvoir exister. Ce livre est un témoignage poignant de la réalité de ce que vivent aujourd’hui les victimes de pédocriminalité et met en lumière les synergies complexes qui tendent les familles dysfonctionnelles où l’inceste évolue sur fonds de toute-puissance. La persécution que les membres complices de ma famille m’ont fait vivre perdura après la naissance de mes enfants et continue encore à ce jour. L’inceste est bien la domination suprême d’un être sur un autre qui, quand il est fortuné, dispose de tous les moyens juridiques pour nuire à sa proie. Comment se construire en tant que femme dans un tel contexte ? Comment ne pas perdre espoir dans son humanité face à une telle violence ? Quand l’agresseur est atteint de paranoïa, une seule issue s’offre alors à la victime : fuir pour sa vie. 
L’inceste représente un enjeu majeur pour notre société contemporaine, la diffusion des témoignages d’anciennes victimes permet de lever le déni collectif qui entoure la pédocriminalité, participe à la protection de nos enfants et nous permet de retrouver notre dignité. 
Ce livre s’adresse à un public large : aux professionnels de la santé mentale, aux victimes d’inceste et de violence intrafamiliale mais surtout, à toute personne désireuse de protéger les enfants de la folie des hommes et leur apprendre, à nouveau, à rêver.

Extrait du livre : 

L’environnement autour de moi est anxiogène, certains bébés périssent, les parents sont angoissés, mais rien n’est pire pour moi que la venue des membres de ma famille. Si petite et déjà consciente que le mal existe. Si petite et déjà violemment rejetée de la famille dans laquelle j’ai vu le jour. « Elle ressemble à un lapin mort, vous devriez lui couper la tête et la donner au boucher », Hilda trouve sa remarque drôle, et entraine l’hilarité de Raymond, mon grand-père paternel. « Mais tais-toi donc, veux-tu ! » lui glissa Henri, son mari. L’image familiale doit à tout prix être préservée, la petite Elena est née, si petite, et prédestinée à être la proie de la seule personne qui la regardera avec amour. La proie d’un prédateur sexuel qui jettera à sa naissance son dévolu sur elle. 

Je suis née à Neuilly-sur-Seine ; la ville y est connue pour abriter des célébrités, mais chez nous point d’acteur, point d’écrivain, point de médecin ni d’avocat. Mes grands-parents sont issus d’un milieu modeste, voire très modeste pour Hilda, immigrée ukrainienne, bien que je note une volonté manifeste de se hisser dans un milieu social qui reste à tous inaccessible. Le traumatisme généalogique réside finalement ici, aucun de nous n’occupera une position importante dans la société. Pourtant on pourrait qualifier mes parents d’argent neuf, personne ne maitrise vraiment les codes de la bourgeoisie, le cercle des privilégiés reste une chimère. Ce fantasme collectif nourrit la violence intrafamiliale, comme c’est souvent le cas dans les familles dysfonctionnelles. Il y a en effet beaucoup de violence dans les milieux privilégiés, les grandes maisons et les appartements haussmanniens cachent parfois des cœurs de pierre, où l’amour de l’argent a depuis longtemps remplacé celui des enfants. L’inceste y est alors toléré, mais tu. Ce n’est pas vraiment l’inceste qui est tabou car il se produit partout, tout le temps : c’est le dire. Un récit d’inceste, un récit somme toute, banal.